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Soutenance
Le 28 septembre 2017
Analyse multi-niveaux de l’économie de la RSE : le cas des entreprises de la filière banane au Cameroun
Jury :
Résumé : le concept de Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE), tout en faisant l’objet de débats sur ses contours (s’agit-il uniquement d’actions volontaires allant au-delà des exigences légales ? ou y a-t-il des implications réglementaires ?), soulève un intérêt croissant en Afrique depuis les années 2000, a fortiori dans les pays où la puissance publique ne parvient pas à assurer un niveau satisfaisant de fourniture en services sociaux de base ou à faire respecter le droit existant. L’analyse économique considère en général ces actions comme une forme d’internalisation volontaire des externalités d’une entreprise, ce qui présuppose un principe contesté de substituabilité entre éléments naturels (assimilés à du « capital naturel », à la différence du concept de « patrimoine »), et ne tient pas compte du fait que le périmètre impacté par une action de RSE ne se limite pas nécessairement à celui envisagé lors de sa conception (pensée comme une action bénéficiant à un type d’acteur interne ou externe à l'entreprise, elle peut avoir un impact sur d’autres acteurs). En outre, les effets peuvent être mixtes (par exemple, négatif en parallèle des bienfaits attendus). Évaluer l’effet des actions de RSE implique donc de chercher à prendre en compte leur possible « double-effet » (i.e. saisir les différentes dimensions de leur impact, sans se limiter aux seuls effets positifs préalablement recherchés), en intégrant l’analyse dans une approche multi-niveaux (afin de s’intéresser aux différentes échelles d’interactions concernées). Cette thèse cherche à mener une telle évaluation pour la filière banane d’exportation du Cameroun, où l’on assiste au déploiement récent et important d’actions de RSE, et propose une analyse globale des dispositifs mis en œuvre par les entreprises du secteur, en nous situant en particulier par rapport à la gestion collective, sur le territoire, de la ressource foncière – liée au core business de toute agro-industrie. La thèse mobilise l’outillage méthodologique développé par Elinor Ostrom et le Bloomington Workshop, qui permet d’analyser le processus décisionnel et les effets structurels induits, après l’avoir enrichi pour le rendre opératoire pour l’étude d’un tel objet de recherche : notamment prendre en compte le contexte camerounais de corruption systémique et la forte conflictualité observée dans la gestion du foncier agricole. Pour en « révéler » la grammaire institutionnelle, cette opérationnalisation implique de stabiliser certains concept-clés : la thèse propose donc des clarifications conceptuelles sur la caractérisation des types de systèmes de ressource, sur les conditions nécessaires à un commun et donc sur les différentes façons d’appréhender le foncier en fonction du système de ressource considéré et du mode de gestion mis en place à telle ou telle échelle. La thèse analyse ensuite l’histoire et les modalités d’appropriation foncière dans les territoires bananiers du Cameroun, afin d’expliciter la grammaire institutionnelle qui régit les règles de gestion de la ressource foncière de l’un d’eux (le Moungo), dont la comparaison avec l’idéaltype du commun permet de proposer une évaluation systémique des dispositifs RSE observés. Enfin, le relevé méthodique des indices de modification des rapports sociaux dans et autour de l’entreprise, en analysant l’impact sur les modes de régulation sociale de ces dispositifs (dont la certification Fairtrade ou la multiplication d’actions sociales à destination des communautés riveraines), amène à conclure que cet effet s’apparente à du « néopaternalisme », par lequel se diffuse une forme de gouvernementalité managériale : les bénéfices matériels de certains dispositifs RSE pour les ouvriers et les populations locales ont ainsi pour corollaire une réduction de leurs capabilities – et donc une réduction des possibilités d’action face aux problèmes environnementaux et sociaux que peut leur poser l’activité agro-industrielle étudiée.
- Monsieur Jean-Pierre Chanteau (Directeur de thèse), Université Grenoble Alpes
- Monsieur Richard Sobel (Rapporteur), Université de Lille 1
- Monsieur Jean Cartier-Bresson (Rapporteur), Université Versailles Saint-Quentin
- Monsieur Ludovic Temple (Examinateur), CIRAD Montpellier
- Monsieur Raymond Ébalé (Examinateur), Université Yaoundé 1, département d'Histoire
- Madame Sandrine Michel (Examinateur), Université de Montpellier
Résumé : le concept de Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE), tout en faisant l’objet de débats sur ses contours (s’agit-il uniquement d’actions volontaires allant au-delà des exigences légales ? ou y a-t-il des implications réglementaires ?), soulève un intérêt croissant en Afrique depuis les années 2000, a fortiori dans les pays où la puissance publique ne parvient pas à assurer un niveau satisfaisant de fourniture en services sociaux de base ou à faire respecter le droit existant. L’analyse économique considère en général ces actions comme une forme d’internalisation volontaire des externalités d’une entreprise, ce qui présuppose un principe contesté de substituabilité entre éléments naturels (assimilés à du « capital naturel », à la différence du concept de « patrimoine »), et ne tient pas compte du fait que le périmètre impacté par une action de RSE ne se limite pas nécessairement à celui envisagé lors de sa conception (pensée comme une action bénéficiant à un type d’acteur interne ou externe à l'entreprise, elle peut avoir un impact sur d’autres acteurs). En outre, les effets peuvent être mixtes (par exemple, négatif en parallèle des bienfaits attendus). Évaluer l’effet des actions de RSE implique donc de chercher à prendre en compte leur possible « double-effet » (i.e. saisir les différentes dimensions de leur impact, sans se limiter aux seuls effets positifs préalablement recherchés), en intégrant l’analyse dans une approche multi-niveaux (afin de s’intéresser aux différentes échelles d’interactions concernées). Cette thèse cherche à mener une telle évaluation pour la filière banane d’exportation du Cameroun, où l’on assiste au déploiement récent et important d’actions de RSE, et propose une analyse globale des dispositifs mis en œuvre par les entreprises du secteur, en nous situant en particulier par rapport à la gestion collective, sur le territoire, de la ressource foncière – liée au core business de toute agro-industrie. La thèse mobilise l’outillage méthodologique développé par Elinor Ostrom et le Bloomington Workshop, qui permet d’analyser le processus décisionnel et les effets structurels induits, après l’avoir enrichi pour le rendre opératoire pour l’étude d’un tel objet de recherche : notamment prendre en compte le contexte camerounais de corruption systémique et la forte conflictualité observée dans la gestion du foncier agricole. Pour en « révéler » la grammaire institutionnelle, cette opérationnalisation implique de stabiliser certains concept-clés : la thèse propose donc des clarifications conceptuelles sur la caractérisation des types de systèmes de ressource, sur les conditions nécessaires à un commun et donc sur les différentes façons d’appréhender le foncier en fonction du système de ressource considéré et du mode de gestion mis en place à telle ou telle échelle. La thèse analyse ensuite l’histoire et les modalités d’appropriation foncière dans les territoires bananiers du Cameroun, afin d’expliciter la grammaire institutionnelle qui régit les règles de gestion de la ressource foncière de l’un d’eux (le Moungo), dont la comparaison avec l’idéaltype du commun permet de proposer une évaluation systémique des dispositifs RSE observés. Enfin, le relevé méthodique des indices de modification des rapports sociaux dans et autour de l’entreprise, en analysant l’impact sur les modes de régulation sociale de ces dispositifs (dont la certification Fairtrade ou la multiplication d’actions sociales à destination des communautés riveraines), amène à conclure que cet effet s’apparente à du « néopaternalisme », par lequel se diffuse une forme de gouvernementalité managériale : les bénéfices matériels de certains dispositifs RSE pour les ouvriers et les populations locales ont ainsi pour corollaire une réduction de leurs capabilities – et donc une réduction des possibilités d’action face aux problèmes environnementaux et sociaux que peut leur poser l’activité agro-industrielle étudiée.
Date
Le 28 septembre 2017
Complément date
14h00
Localisation
Complément lieu
Bâtiment Simone Veil, salle 004, rez de chaussée
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